mardi 20 décembre 2011

J'ai couru avec une demoiselle

C'est un après-midi de printemps. Le ciel est bleu franc, dégagé et mat. Une légère bise tient mes mains fraiches depuis les premières heures. Je décide de courir.

Short noir, sweat-shirt blanc, je lace mes chaussures et visualise mon parcours : une route longée par un ru silencieux, un sinueux chemin de terre aux racines apparentes, une forêt dense de charmes et la clairière aux chevaux.

Un verre d'eau et c'est parti.

Je m'imprègne des odeurs de mousses printanières. Il est plus de 18h, l'humidité est perceptible.

Une libellule me chahute. J'ai l'impression qu'elle me suit.

J'attaque le chemin de terre avec plaisir, passant de la lumière à l'ombre. Je ne croise jamais personne, ici. Le chuchotement du ruisseau me quitte progressivement.

Je connais peu les libellules, mais celle-ci m'est familière, c'est un "Calopteryx splendens". Elle vient de m'effleurer la joue et de me faire faire un écart ! Quelle grâce ! Elle me tourne nerveusement autour comme une abeille autour d'un pot de confiture. Je diminue mon allure et décide de profiter de cet instant rare.

Je lui parle, un peu (oui, quand je cours, je parle aux animaux que je croise, même si la plupart du temps ce sont des vaches ou des chevaux). Elle m'intimide dans sa robe bleutée aux reflets verts. Je n'ai jamais appris à m'adresser à un Caloptéryx. Les mots me manquent.

Je m'arrête.

On appelle ces libellules des "Demoiselles".

La jolie Demoiselle se pose donc sur mon épaule. Ses ailes noire se rejoignent de chaque côté de l'abdomen.

Je reprends ma course, doucement, de façon à ne pas l'effrayer. Elle m'accompagne.

Dans la clairière, le soleil du crépuscule caresse ma compagne et lui donne une couleur magnifique. Mon parcours s'achève. Elle reprend son envol vers un champ de colza.

Touché par cette rencontre, je délace mes chaussures, rêveur, en espérant recroiser la route, un jour, de cette si charmante demoiselle.