jeudi 23 août 2012

La baguette du dimanche matin

Elle est molle, cette baguette. Jaune et molle. Je ne sais pas pourquoi je m'obstine à l'acheter au supermarché. C'est comme un réflexe. Je fais deux ou trois courses, je me dis "Tiens, j'ai pu de pain !", et pof, je prends une baguette. Jaune. Et molle.

Je la regarde, sur la table. Elle tranche un peu, entre mon bol de café (brulant) et le programme télé. Mon café aussi est mou, d'une certaine façon. Il est liquide, certes, mais peut-on considérer que le liquide est une sorte de solide mou ? Je ne sais pas. Du bout du doigt, j'appuie et déforme la croute du pain, sans bruit. Il est mou, pourtant, je n'arrive pas à le considérer comme quelque chose de liquide. C'est compliqué. Je suis levé depuis à peine dix minutes et je sens que les engrenages ont du mal de se mettre en place (heureusement, on est dimanche, j'ai le temps !).

Je vais me servir un verre d'eau. Au robinet. L'eau du robinet est sans doute ce qu'il existe de plus liquide, sur Terre. Jamais on n'a entendu un spécialiste dire qu'il avait trouvé quelque chose de plus liquide que l'eau ! Jamais. Le liquide type, de toute évidence, c'est l'eau (l'eau du robinet me semble plus liquide que l'eau en bouteille). Là, posé entre le bol de café (tiède) et la longue baguette molle, l'évidence s'impose : le café est plus de type "liquide" que le pain, même mou.

Je renverse mon bol de café. Le liquide brun (et presque froid, maintenant (c'est malin !)) se répand sur la nappe et dégouline sur le parquet flottant. Le verre d'eau, pareil, sauf que le liquide est transparent (évidemment). La baguette, en revanche, roule sur quelques centimètres avant de s'immobiliser dans un silence mat. Même très très molle, elle ne dégouline pas. On dira ce qu'on voudra, au réveil, mon fin cerveau d'analyste fonctionne à plein régime. La baguette du supermarché est et restera un solide mou, donc non-liquide.

L'esprit clair, je prends quelques carrés d'essuie-tout et éponge la nappe. Pour vérifier un truc (un doute, léger), j'éponge le pain, mais non, rien ne se passe. La conclusion est accablante pour ce bout de farine et de levure mal travaillé.

Un dernier morceau d'essuie-tout pour nettoyer le parquet et le tour sera joué. Le parquet… flottant. Il flotte, donc. Et s'il flotte, c'est forcément sur quelque chose de liquide (de type "eau", ou "café" (pas "pain", surtout !)). C'est compliqué, vraiment.

Je vais me recoucher. Je démonterai ce parquet plus tard.

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